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L'Unec appelle les coiffeurs à manifester

Les coiffeurs ne demandent pas la lune : ils veulent seulement « bien vivre leur métier, et bien vivre de leur métier » ! Ils ne demandent pas d’aides, ils acceptent évidemment le principe de la libre concurrence mais, par l’intermédiaire de l’Unec et de son président Christophe Doré, ils veulent aussi rappeler au gouvernement que, sur un marché donné, toutes les entreprises doivent être soumises aux mêmes règles.

« Les coiffeurs sont étouffés par l’exercice d’une concurrence déloyale soutenue et alimentée par le gouvernement, et par des charges toujours plus écrasantes qui découragent l’entrepreneuriat dans la coiffure », soutient ainsi l’Unec. Qui appelle tous les coiffeurs à aller s’exprimer dans la rue, le lundi 30 juin prochain, à partir de la place de la Bastille, à Paris, à 14h. Un appel à manifester historique pour une profession traditionnellement très discrète, qui donne toujours la priorité à son travail et à ses clients. Mais trop, c’est trop. Ainsi l’exprime Christophe Doré dans ce « coup de gueule » et cet appel à la mobilisation.

Pour agir et faire pression sur le gouvernement, une pétition a également été lancée : signez-la et partagez-la par ici.

Rétablir la justice dans le secteur coiffure

Les revendications de l’organisation syndicale ? Lutter contre la concurrence déloyale, d’une part, et obtenir une baisse des charges sociales, d’autre part. Et Christophe Doré de rappeler qu’on impose aux coiffeurs toujours plus de règles (accessibilité, RGPD, électricité, document unique, affichage des prix, déclaration au registre des métiers, etc.), tandis que, dans le même temps, l’application d’une directive européenne a conduit à supprimer, en juillet 2023, l’obligation d’avoir une personne titulaire du BP pour toute ouverture de salon.

 

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En contrepartie de la suppression de cette obligation (une réglementation du métier datant de 1946*), le gouvernement s’était engagé à accompagner cette libéralisation forcée par des contrôles réguliers des établissement. Or, comme le souligne Christophe Doré : « Il y a eu en juillet 2023 un engagement du gouvernement à assurer le contrôle des établissements, et aujourd’hui cet engagement n’est pas respecté. »

Résultat, le nombre de salons de coiffure continue à augmenter (il y en avait déjà beaucoup trop avant cette dérèglementation), le nombre de salariés à diminuer, au profit d’installations illégales, de tarifs anormalement bas, d’ouvertures en dehors des jours et des horaires utilisés, de dissimulations fiscales, de non-déclarations de personnel… Bref, c’est la loi de jungle, les établissements illégaux ne sont pas déclarés, ni contrôlés, ils n’ont pas de réglementations diverses à respecter (qui induisent des coûts), et ils ne souffrent évidemment pas de l’écrasant poids des charges sociales qui pèsent sur les entrepreneurs français.

L'indifférence et le mépris des pouvoirs publics

Et Christophe Doré de se désoler : « Malheureusement, à part en référer aux pouvoirs publics, et demander plus de contrôles ciblés, plus d’efficacité et plus d’équité de traitement, nous n’avons aucune possibilité d’action : nous n’avons pas de pouvoir de police, ni de justice, et nous déconseillons bien évidemment aux coiffeurs de se faire justice eux-mêmes, car non seulement ce n’est pas légal, mais cela peut être dangereux. » En effet, derrière ces établissements de coiffure peu scrupuleux, comme derrière certains autres établissements d’esthétique, tels que les ongleries, on ne sait jamais qui est à la manœuvre (mafias, blanchiment d’argent…).

 

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Bref, les coiffeurs subissent à la fois des distorsions de concurrence, dans l’indifférence générale des pouvoirs publics qui ont contribué à les aggraver en 2023, mais aussi le poids de charges sociales trop lourdes qui pèsent sur la rentabilité des TPE et les rémunérations des chefs d’entreprises comme des salariés, sans parler de l’inflation et de ses conséquences sur le pouvoir d’achat des Français, le prix de l’immobilier et de l’énergie. Dans ces conditions, ils devraient bien évidemment augmenter leur prix. Mais, dans les services à la personne comme dans l’habillement, on le voit, les Français ne sont plus enclins à payer davantage, et ce sont bien souvent les marchés d’entrée de gamme, ou du discount, ainsi que le haut de gamme, qui tirent leur épingle du jeu. Et encore…

Un marché qui s'atomise, et se paupérise

Depuis plusieurs années, le marché de la coiffure se fragmente, voire s’atomise (80 000 établissements de coiffure en France en 2014, contre 110 000 aujourd’hui ; 180 000 actifs dont 108 000 salariés ; soit, au final, bien moins de salariés que d’établissements de coiffure). Avec 26% de coiffeurs à domicile, free-lance, auto-entrepreneurs etc. (un chiffre qui continue d’augmenter), le marché, parallèlement, se paupérise.

Moins de salariés, c’est aussi moins de cotisations sociales et donc, en perspective, la nécessité d’augmenter les prélèvements, ce qui alourdira encore le poids des charges sociales. Un vrai cercle vicieux qui est aussi celui de tout l’artisanat, célébré il y a quelques années comme « la 1ère entreprise de France » mais toujours méprisé par les pouvoirs publics.

Les coiffeurs, comme tous les artisans, ne pourront guère plus longtemps se payer de mots. Ni de manifestations policées, une fois tous les dix ans. En France, on le sait, ce ne sont pas les demandes les plus légitimes qu’on entend, mais les plus bruyantes, et les plus violentes. Le gouvernement ne pourrait-il pas, enfin, tendre l’oreille à une profession qui ne souhaite que vivre dignement de son métier, et être reconnue à sa juste valeur ?

* destinée à canaliser les ouvertures et à garantir la sécurité des services techniques pour la clientèle grâce à un niveau de formation significatif
02/06/25

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